jeudi 21 décembre 2017

Sur l'humour

On parle beaucoup d'humour dernièrement sur Twitter et j'avais envie de clarifier un peu le propos. Et ce texte permettra un peu plus le "temps long" qui manque sur le réseau aux désormais 280 caractères.

Je me suis beaucoup intéressé à l'humour ces dernières années. J'ai lu Bergson, beaucoup d'humoristes, des posts de blog etc...Je crois que ce besoin de me plonger dans la philosophie du rire provenait beaucoup de Dieudonné, dont j'ai été un grand fan. Il me fallait trouver les clés conceptuelles pour comprendre ce qui clochait. Réconcilier mon désir absolu de liberté d'expression (et en ce sens je suis bien plus libertaire que la loi Française par exemple, contre les lois mémorielles et la plupart des incitations à la haine) et pouvoir dire clairement que Dieudonné était hors limite.

L'humour, c'est comme la politesse au fond. Je refuse qu'on le réglemente par des lois, je refuse qu'on me force à être poli. Mais je demande à tous de l'être, et souvent, j'exclus de mes cercles les malotrus L'humour comme la politesse sont affaires de cultures, de pays, de contexte aussi, vous allez appeler votre meilleur pote "ma couille" mais pas votre professeur. Vous allez parfois vouvoyer vos grands-parents mais pas toujours. L'humour comme la politesse évolue, justement, on tutoie de plus en plus nos grands-parents, ce qui semblait sans doute incongru il y a une voire deux générations.

Mais puisque nous sommes sur un blog, permettez moi d'évoquer mon propre humble vécu. Jusqu'en 1ère environ, j'avais un petit surnom : "Marréchaux". A dire vrai, je ne le comprenais pas trop, j'hésitais entre une désignation militaire, et un marchand de légume. C'était très courant, "hey marrécho par ci, marrécho par là" j'avais fini par m'y faire et y répondais comme mon prénom. Et puis un jour, j'ai compris, "marrécho" c'était en fait "Marron chaud". Si ce n'est pas clair, je suis d'origine Indienne, et on me désignait comme les vendeurs de marrons à la sauvette souvent immigrés du sous-continent Indien. Le jour où j'ai compris, appelez moi fragile ou faible, mais j'ai pleuré. Pleuré comme un gamin qui réalise que tous ses copains s'étaient foutus de sa gueule pendant plusieurs années. Et pourtant, j'étais dans un beau Lycée du Vème arrondissement, j'habitais les beaux quartiers, et j'avais des parents relativement aisés. Mais non, j'ai été triste comme jamais et encore aujourd'hui subsiste une vraie émotion.

Alors j'ai beaucoup de mal avec tous ceux qui aujourd'hui te prétendent que "on ne peut plus rien dire, que la censure nous guette, que c'était mieux avant etc...." Est ce que votre désir de vous poiler vaut le désarroi d'un ado de 15 ans? Encore une fois, loin de moi le désir de censure, juste que les gens qui font ce genre de blague réfléchissent.

Je sais ce qu'on me répondra, qu'on se moque de tous, du petit gros, de la bimbo, du gars avec ses dents de lapin, du roux. Mais ma souffrance est elle justifiée car tout le monde souffre? Le raisonnement me semble vicié.

On me dira aussi que cela m'a endurci, ou que c'est de ma faute, que j'aurais du être moins naïf et me défendre. Peut être connaissez vous une personne qui a subi les même railleries et en parle avec nostalgie aujourd'hui. Mais encore une fois, doit on supporter les larmes de neuf enfants pour qu'un sur dix devienne plus fort? A ce compte là, on peut tout aussi bien justifier les coups de ceinturon.

C'est peut être pour cela que je pense que l'humour doit servir les faibles. L'humour est un instrument de lutte contre l'autorité, le tyran, pas l'inverse. Et je ne parle même pas de souffrance, car chacun souffre à sa manière. Que des enfants fassent une blague potache sur leur professeur, on trouvera ça mignon. Que le professeur en question se moque d'un élève en difficulté devant toute la classe et cela choquera beaucoup. Ca me semble évident, mais pas à tout le monde malheureusement.

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